Texte recopié
Alors, pourquoi mettre en exergue les turpitudes maçonnes? Pourquoi ne pas comptabiliser aussi les scandales qui ont touché des catholiques, des juifs ou des protestants? Parce que cela n'a rien à voir. Les appartenances religieuses ne débouchent pas sur un sys-tème relationnel aussi sophistiqué que la franc-maçonnerie: trans-partis, trans-sociétal, trans-générationnel, interconfessionnel et international. Les frères se rencontrent régulièrement. Leurs réunions sont suivies d'agapes où l'on discute de tout et de rien. Ils se retrouvent dans les fraternelles, des clubs informels organisés par affinités professionnelles, quelle que soit leur obédience, alors que le règlement de la GLNF interdit normalement à ses membres d'avoir des contacts avec ceux du GO, de la GLF ou de Droit humain! Il y a une fraternelle parle-mentaire, une fraternelle des hauts fonctionnaires, des attachés parlementaires, du bâtiment, de la restauration, des HLM, du Palais, des Postes, etc. Elles se réunissent dans des lieux secrets. Impossible de savoir qui fréquente, par exemple, la fraternelle des hauts fonctionnaires. On sait seulement qu'elle a longtemps été présidée par Michel Sy, ancien directeur de recherche au CNRS, ancien député, proche du RPR, avant qu'il ne cède la place à un socialiste. Est-ce vraiment sans grande importance, comme l'affirment les responsables des différentes loges? Ou bien, ainsi que le fait remarquer un polytechnicien, maçon:
«Se rencontrer régulièrement, parti-
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ciper à des agapes, ce n'est pas neutre.»
Les maçons adorent les clubs. Les clubs maçons à 100%: le CA 25 - Club des amis du 25 novembre 1977, date de l'élection de Jacques Chirac à la mairie de Paris - qui compte 130 frères, ou le Carrefour de l'amitié. Mais aussi les clubs ouverts aux profanes, comme le Siècle ou le Club des cent, etc. Les plus puissants d'entre eux se regroupent dans des loges phares: la loge Demain (GO), dite loge des ministres; la loge République (GO), où l'on peut croiser le syndicaliste Marc Blondel, le sénateur Henri Caillavet, l'ancien grand maître Patrick Kessel, l'avocat Francis Szpiner et de nombreux journalistes; la loge Victor-Schœlcher (GO), créée par l'ancien grand maître Jean-Pierre Prouteau; la loge René-Cassin (GLF), créée par Jean-Louis Mandinaud, vice-président du Conseil économique et social; la loge Nouvelle Jérusalem (GLF), où a été initié Olivier Dassault et qui fonctionne comme un lobby pro-Israël; la loge Communication (GLNF), la plus étincelante, à laquelle appartiennent Patrick Le Lay, PDG de TF 1, Pierre Dauzier, ex-PDG d'Havas, Gilbert Gross, ancien président de Carat Espaces (qui a été mis en examen dans le cadre de l'affaire de la Française des jeux); la loge Bannière étoilée (GLNF), qui accueille de puis-sants hommes d'affaires américains.
Ces loges, très contestées par la base, sont en fait destinées à attirer en maçonnerie des hommes de pouvoir trop occupés pour se plier aux contraintes des «loges bleues», fréquentées par le commun des maçons. Elles servent de «produit d'appel».
Pour autant, un frère «trois points» ne peut pas téléphoner pour deman-
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der un passe-droit au préfet Gérard Cureau, conseiller auprès de Jean-Pierre Chevènement. Ni obtenir un marché à n'importe quel prix sous prétexte qu'il est de la famille. Mais bien des maçons le reconnaissent: « Cela nous permet d'avoir un coup d'avance . On est immédiatement en confiance. On se dit les choses clairement. Le dossier ne traîne pas dans des tiroirs.» «On passe beaucoup de temps en loge; n'est-ce pas normal qu'on puisse gagner un peu de temps par ailleurs?» se défend un chef d'entreprise, ancien vénérable.
Trois frères au gouvernement
Réticent à avouer son appartenance maçonnique, un président de fédération patronale raconte pourtant: «Je n'ai pas été recruté parce que j'étais maçon. Et je ne m'en sers pas. La première fois que j'ai rencontré Patrick Le Lay, je lui ai dit que j'appartenais à la même famille. Il m'a répondu: “Je le savais.” Depuis, nous sommes amis. La même chose avec Jean Miot. Mais cela n'a rien à voir avec la maçonnerie.» Néanmoins, si l'on regarde qui il fait travailler - quelle agence de relations publiques, quel cabinet d'experts-comptables - on trouve beaucoup de maçons. «A qualité égale, je choisis un frère», acquiesce-t-il.
De telles situations, il y en a des centaines. On compte, par exemple, beaucoup de maçons dans les tribunaux de commerce. S'ils ont les bonnes connexions, les avocats maçons seront vite au courant des affaires juteuses
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